• Trois questions à Anne Houtman, ancienne Représentante de la Commission européenne en France

     • Publié le 1 février 2019 • Rubrique(s) Actualités de l'Union europénne, Actualités de la Maison de l'Europe, Tout sur l'Europe

    Dans le cadre de la conférence sur l’avenir en Europe des professions réglementées du mercredi 23 janvier, Anne Houtman, ancienne cheffe de la représentation de la Commission européenne en France, était présente sur Rennes. L’occasion pour nous, de lui poser quelques questions sur les enjeux des futures élections européennes.

    Bonjour Madame Houtman, pouvez-vous présenter votre parcours ?

    « Je suis mathématicienne. Donc à l’origine, j’envisageais un tout autre métier, qui était celui de professeur. J’ai fait un PhD en statistiques aux Etats Unis où j’ai vécu 6 ans. J’ai travaillé dans le privé, dans le marketing, et puis je suis entrée à la Commission en 1985. J’ai passé un peu plus de 30 ans à la Commission dans beaucoup de services différents comme l’office statistique, la DG concurrence pendant 12 ans, j’ai été cheffe adjointe au cabinet de Romano Prodi quand il était président de la commission. Puis, j’ai été directeur dans différentes DG : marché intérieur, transports, énergie … Et j’ai dirigé la Représentation de la Commission européenne à Paris. Là, j’ai quitté la Commission pour une retraite très active. »

    Selon vous, quels sont les enjeux des élections européennes ?

    « Le principal enjeu va être un enjeu de démocratie et de vision future de l’Europe, dans laquelle, c’est un point de vue très personnel, on va gérer le changement climatique.C’est pour moi, pas seulement une transformation du système économique, mais aussi une transformation de la vie quotidienne des gens. C’est quelque chose qui impacte beaucoup plus l’économie et les personnes que l’on imagine. On est dans un moment où l’on voit dans beaucoup de pays des régimes autocratiques s’installer. Je pense que les gens auront peut-être oublié ce que c’est que la chance de vivre dans une démocratie. Je peux mentionner d’autres sujets : par exemple, j’estime qu’un des pas important que l’Europe devrait faire est de réduire l’utilisation de l’unanimité dans beaucoup de sujets, ce qui permettrait d’avancer dans le domaine social, dans le domaine de la taxation, pas pour harmoniser les taxes en Europe, mais pour lutter contre la fraude, pour pouvoir taxer les grands GAFA… Même la simplification administrative en matière fiscale passe par l’unanimité. Il y a donc des choses simples qu’on pourrait faire qui à l’unanimité sont presque impossibles. Il y a tous les sujets liés à la politique étrangère, au droit d’asile. On n’a pas de règle commune sur les droits d’asile et on voit bien les problèmes que ça pose. C’est vrai qu’il y a des tas d’autres enjeux que le climat. Mais c’est un sujet de cœur pour moi, disons. »

    Pouvez-vous nous parler d’une rencontre avec une personnalité au niveau de l’union européenne qui vous a vraiment marquée ?

    « J’ai travaillé cinq ans avec Romano Prodi. On apprend beaucoup des personnes qui ont une expérience politique, par exemple, pour comprendre ce qu’est le rôle d’un parlement. Une chose qui m’a beaucoup frappée quand j’étais avec Romano Prodi, par opposition avec la commission Barroso, il vient d’un pays où le parlement peut renverser du jour au lendemain le gouvernement. Il l’a vécu lui-même. On se préoccupe alors de ce qu’on pense au parlement. Ce n’est pas le cas de Barroso qui vient d’un régime politique dans lequel on  peut très bien gérer un gouvernement sans trop se préoccuper des débats parlementaires. On a alors moins une culture du débat, du compromis. Moi, en tant que belge, je trouve cette culture du compromis extrêmement importante. Et j’ai vu à quel point Romano Prodi cherchait à écouter les gens, à comprendre ce qu’ils veulent. »

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