• Épisode 3/3 : L’air : particules fines et énergie, pour un vent nouveau sur la politique énergétique européenne

     • Publié le 4 juin 2021 • Rubrique(s) MDE

    Épisode 3/3 : L’air : particules fines et énergie, pour un vent nouveau sur la politique énergétique européenne

    Ce vendredi, 3ème et dernier épisode de notre série consacrée à l’environnement, cette fois-ci consacré à l’air et à l’énergie, car les deux sont bien souvent liés. L’air quand il est pollué, constitue une source de dangers pour la santé des populations. De plus, il constitue une partie de la réponse que l’Union européenne veut trouver pour parvenir à une transition énergétique vers le bas carbone. Alors comment l’Union européenne peut constituer un moteur de cette transition énergétique et dans le même temps, atténuer ou même régler le problème de la pollution de l’air en Europe ?

    Gw21 Some Notext Air Insta

    Une politique de l’air nécessaire pour endiguer une pollution qui tue

    La qualité de l’air observée reste assez disparate au sein de l’Union européenne. En effet il y a de grandes différences entre les grands centres urbains où la circulation des véhicules est assez intensive et les campagnes ; de plus il y a de grosses différences entre les pays de l’Union européenne et même entre les villes entre elles, car la politique de l’air, même si elle répond à des standards européens, dépend beaucoup du volontarisme des maires pour être appliquée. Ainsi, en fonction de la structure productive, des industries, du mode de production d’énergie du pays, les niveaux de pollution de l’air varient énormément.

     Note : l’expression « pollution de l’air » regroupe beaucoup de pollutions différentes. Il existe partout dans l’Union européenne des stations mesurant en temps réel les taux des différentes particules dangereuses dans l’air. Il y a 5 points de contrôles :

    • Le Benzopyrène (ou BaP) : polluant émis par la fumée de cigarette et dans les gaz d’échappement, très cancérigène et persistant dans l’air et a fait l’objet d’une directive européenne dès 2004.
    • Le Dioxyde d’azote (NO2) : polluant majeur de l’air, toxique, dégagé par les moteurs diésels et les centrales, donne un aspect ocre-brun aux métropoles très polluées par la circulation, les État-membres de l’UE ont une obligation de résultats quand aux seuils à ne pas dépasser.
    • L’Ozone (O3) : naturellement présent à haute atmosphère mais l’un des polluants les plus dangereux à basse atmosphère (9 µg/kg suffisent à entraîner des œdèmes pulmonaires).
    • Les particules fines (PM pour Particulate Matter) : les stations mesurent 2 calibres de particules fines, les PM10 (particules avec un diamètre inférieur à 10 micromètres) et les PM2.5 (particules avec un diamètre inférieur à 2.5 µm)
      • Les PM10 sont cancérigènes, peuvent déclencher des crises d’asthmes ou autres affections respiratoires en cas de pics de pollution.
      • Les PM2.5 sont les plus dangereuses, en pénétrant directement dans les alvéoles pulmonaires, elles entraînent près de 4 millions de décès par an selon l’OMS.

    Ainsi, des pays comme la Pologne, dont la production électrique vient à 84% de l’énergie thermique (centrales à charbon, à gaz) polluent énormément et cela se ressent sur la qualité de l’air.Image3

    Au-delà d’instaurer des standards de pollution et de confier leur contrôle à l’Agence Européenne de l’Environnement, l’Union européenne pourrait se doter de mécanismes plus coercitifs pour éviter les 400 000 morts prématurés causés par la pollution de l’air chaque année dans l’UE. Parmi les options possibles, le recours en manquement d’État, si un État-membre de l’UE ne respecte pas ses obligations de manière manifeste et répétée et qu’il ne prouve pas par ses décisions politiques, sa volonté d’améliorer la qualité de l’air.

    Quelle énergie propre et décarbonée pour le futur ?

    Alors, une des principales solutions pour améliorer la qualité de l’air dans l’UE serait de changer notre mode de production de l’énergie. La politique énergétique concentre bon nombre d’enjeux clés dans l’UE et dans le monde. Déjà, la production d’électricité et de chaleur est la principale source d’émission de CO2 dans le monde, elle représente 25% des émission mondiales selon l’Agence américaine de l’environnement et selon le GIEC (Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat). De plus et comme mentionné plus haut, c’est bien par la production d’électricité par voie thermique que la Pologne et d’autres pays comme l’Allemagne détériorent la qualité de leur air. La production d’énergie est proprement indissociable des enjeux environnementaux qui doivent occuper le 21ème siècle.

    Global Emissions Sector 2015©GIEC

    Mais alors quelle orientation donner à la politique énergétique en Europe ? Le Pacte Vert pour l’Europe prévoit de « décarboner la production d’énergie » tandis que le plan de relance européen prévoit près de 373,9 milliards d’euros sur 7 ans (cadre 2021-2027). Il est important de voir comment il est possible de décarboner le secteur de l’énergie concrètement, en allant plus loin que des termes généraux. Décarboner la production d’énergie (la rendre neutre ou très faiblement émettrice de CO2) suppose d’abandonner le charbon ou le pétrole. Cela suppose aussi de nuancer l’impact positif des Energies Renouvelables (ENR) ou en tout cas de rationaliser l’allocation des fonds pour atteindre l’objectif fixé.

    Les ENR regroupent plusieurs énergies, toutes listées dans le graphique ci-dessous.

    Imager ©Jancovici

    Les ENR françaises représentent en valeur absolue une petite part du mix énergétique français. En outre le solaire et l’éolien représentent une plus petite part encore du mix énergétique français. Pourtant, le solaire reçoit en France 40% du soutien public, l’éolien 20%, alors qu’ils ne représentent qu’une partie très marginale de la production électrique française. De plus, ces énergies sont par nature intermittentes, c’est-à-dire qu’elles ne produisent pas quand il n’y a pas de vent ni de soleil. Baser tout un mix énergétique sur les ENR est donc dangereux car cela peut entraîner des pannes dans les périodes basses.

    Imageé©The Shift Project

    A l’échelle européenne, pour décarboner au mieux la production d’énergie, il ne faut donc pas mettre toutes ses billes sur l’éolien et le solaire mais diversifier les ENR. De plus, même si le nucléaire n’est pas une solution de long terme car le combustible (les crayons d’uranium) est fossile, il constitue aujourd’hui un énorme atout tant il est source d’énergie décarbonée (50 g de CO2 pour 1 kWh (kilowattheure) en France en 2015 contre 500 g pour l’Allemagne) et relativement bon marché, quand les chantiers ne se finissent pas comme l’EPR de Flamanville.

    Une réelle solution d’avenir et de long terme doit être envisagée à une échelle européenne (et mondiale). Cette solution « miracle », c’est le programme ITER (Réacteur thermonucléaire expérimental international). Le projet ITER a une dimension mondiale et l’UE tout entière y est associée, il se trouve à Saint-Paul-lez-Durance dans les Bouches du Rhône. Il prévoit donc la construction d’un réacteur de type tokamak. La réaction de la fusion est analogue à ce qui se passe dans les étoiles.

     « Le tokamak est une machine expérimentale conçue pour exploiter l’énergie de la fusion. Dans l’enceinte d’un tokamak, l’énergie générée par la fusion des noyaux atomiques est absorbée sous forme de chaleur par les parois de la chambre à vide. Tout comme les centrales électrogènes classiques, une centrale de fusion utilisera cette chaleur pour produire de la vapeur, puis, grâce à des turbines et à des alternateurs, de l’électricité. » ©Site ITER

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    Cette technologie est la promesse d’une énergie en continue, propre, qui n’a pas l’impact que l’on connaît du nucléaire sur l’environnement et potentiellement inépuisable puisque la fusion est faite à partir de tritium et de deutérium, présents en abondance dans la nature et fusionnant en un produit de fusion propre, l’hélium.

    Alors à long terme, que ce soit pour le bien de l’air, de l’environnement et de la santé, le projet de « mettre le soleil en boîte » demeure un bel objectif. Encore faut-il parvenir à la construire, cette boîte…

     

     
    Valentin Salperwyck

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