Maison de l’Europe de Rennes et Haute Bretagne – Centre EUROPE DIRECT (MDE – CED) : « Bonjour Olivier. Merci de nous recevoir dans ce magnifique endroit… Plutôt atypique. »
Olivier Thouault (OT) : « Merci à vous. C’est un plaisir de vous accueillir et de vous faire découvrir « La Marelle », un lieu atypique en effet et qui réserve de nombreuses surprises. »
MDE – CED : « Alors justement Olivier, lançons notre caillou et partons à sa découverte. Qu’est-ce qui se cache derrière ce nom si évocateur de l’enfance ? »
OT : « En effet, le nom n’a pas été choisi au hasard. La Marelle, c’est d’abord une opportunité territoriale et familiale. Laurent, qui gère le studio d’enregistrement situé dans la maison de mes grands-parents juste à côté, et avec qui j’ai monté le projet d’Escape Game (entre autres) est mon cousin. C’est au décès de nos grands-parents que nous avons pris la décision d’installer le studio ici. Quant à la maison où nous sommes aujourd’hui, nous l’avons acquise un peu plus tard. Petite anecdote : cette maison, c’est la première maison que mon père a achetée quand il avait vingt ans, qu’il a ensuite vendue en 1986 et que l’on a rachetée cette année. Enfin, ce lieu ne serait pas ce qu’il est sans notre fameux four à pain, qui existe depuis des décennies et qui nous permet d’organiser régulièrement un « Sunday Roast ». C’est un événement convivial et ouvert au grand public, qui attire pas mal de monde. En résumé, « La Marelle », c’est vraiment l’idée de continuer à écrire l’histoire familiale mais aussi celle du territoire qui lui est rattaché. »
MDE – CED : « Une bien belle histoire que vous nous racontez là Olivier. Pouvez-vous nous en dire plus sur les activités du lieu aujourd’hui ? »
OT : « Bien sûr… On y trouve en fait plusieurs choses : d’abord un studio d’enregistrement d’artistes et de mixage de musiques de films mais aussi l’Agence Médiafaune qui est arrivée en 2018 et qui a donné naissance à notre Escape Game, une nouvelle expérience immersive entre virtuel et réel. À l’étage du bâtiment où nous nous trouvons, nous allons créer des espaces de coworking (industries culturelles et créatives) avec l’idée d’accueillir des personnes avec qui nous pouvons créer des synergies. »
MDE – CED : « Corrigez-nous Olivier si besoin, mais c’est bien l’Escape Game qui a reçu un financement européen ? »
OT : « Tout à fait. Cela peut sembler surprenant à première vue peut-être…Mais en fait, notre projet d’Escape Game répondait à plusieurs priorités du Fonds européen de développement régional (FEDER) : favoriser le développement économique des territoires, promouvoir l’innovation et préserver le patrimoine culturel. Concernant la partie « innovation » du projet, parce que c’est sans doute celle qui fait de notre jeu un produit unique et atypique, celle-ci repose sur l’imbrication de deux mondes, le virtuel et le réel. Notre Escape Game peut aussi être qualifié de jeu haptique, c’est-à-dire que quand on est dans la réalité virtuelle, on peut toucher les objets. Enfin, on a aussi profité du jeu pour monter un atelier de découverte du numérique avec une association de défense du patrimoine de Gaël (Les Amis du Point-Clos) à qui on a appris à modéliser, ce qui a aussi incité des jeunes à rentrer dans l’association. Derrière tout cela, nous avions aussi envie de montrer qu’en milieu rural, on peut aussi avoir accès et développer des nouvelles technologies de haut vol. »
MDE – CED : « Plus qu’une envie, c’était un véritable engagement au service de votre territoire de votre part, n’est-ce pas ? »
OT : « Oui, tout à fait. Mais c’est très compliqué. Il y a une vraie problématique autour des compétences. Il en manque sur notre territoire. La question est de savoir comment on peut changer cette situation et comment attirer davantage de profils recherche et innovation. Par ailleurs, nous faisons en sorte de prendre des alternants du territoire, ayant bien conscience de la difficulté pour les jeunes de trouver un logement. Pour les alternants, le problème peut être multiplié par deux quelquefois. Pour des gens qui habitent dans une grande ville et qui ont l’école mais aussi l’entreprise à côté, ce n’est pas du tout la même chose. Autre écueil à mentionner : les banques. Aujourd’hui, nous sommes tenus d’être dans une agence bancaire locale. Au local, il n’y a pas de conseiller spécialisé en innovation. Accompagner sur des crédits d’impôts recherche demande des compétences spécifiques et aujourd’hui, c’est quelque chose qui manque par chez nous, et cela freine l’innovation. Mais si la demande d’accompagnement était plus forte, cela changerait la donne, c’est sûr…C’est un peu le serpent qui se mord la queue. Enfin, autre enjeu majeur : l’accès à Internet. Ça fait plusieurs années que l’on attend la fibre… Ca y est, elle arrive mais en attendant, on a dû mettre d’autres choses en place comme des cartes 4G et deux satellites. On doit aussi réserver quelquefois une bande passante la nuit. On est des gens de la tech donc on sait faire mais ce n’est pas le cas de toutes les entreprises… Il peut se passer plein de belles choses dans les territoires, mais encore faut-il leur en donner les moyens. »
MDE – CED : « Quel regard les gens de votre territoire portent-ils sur votre projet justement ? »
OT : « Au début, c’était un peu compliqué parce que le lieu n’était pas ouvert au public et les gens se demandaient ce qu’on faisait. Mais les choses ont bien changé depuis. Par ailleurs, on a été beaucoup soutenus au niveau institutionnel par la communauté de communes de Saint-Méen Montauban et le Pays de Brocéliande. »
MDE – CED : « Comment souhaitez-vous voir évoluer « La Marelle » ? »
OT : « On veut vraiment que ce lieu dynamise notre territoire et le resoude, et crée du lien entre les gens qui le fréquentent. Je parlais tout à l’heure des espaces de coworking. On se rencontre, on entrevoit des synergies et on travaille ensemble sur des projets. Il faut bien cadrer les choses car l’idée est à chaque fois de développer des pratiques professionnelles. Il ne s’agit pas de tomber dans une dynamique de sollicitations gratuites à répétition mais plutôt d’encourager une dynamique de valorisation des compétences, et ce afin de donner aux gens envie de rester et continuer à travailler sur des projets ensemble. C’est pourquoi nous avons fait en sorte de bien cadrer les choses, afin que les professionnels qui choisissent de travailler ici puissent développer au mieux leur entreprise. »
MDE-CED : « Justement, en parlant de développement d’entreprise, j’imagine que c’est dans cette perspective que vous avez décidé de demander un financement FEDER* ? »
OT : « Oui, en effet. On cherchait des financements et en assisant à une conférence organisée par la Région Bretagne, on a entendu parler du FEDER. Suite à cet événement, nous nous sommes rapprochés du Pays de Brocéliande. En discutant avec le technicien en charge de notre dossier, nous nous sommes aperçus qu’il y avait une ligne sur les pratiques numériques dans les territoires et c’est comme ça que nous avons entamé les démarches pour recevoir une aide européenne. Cela nous permettait ainsi de passer de l’activité professionnelle BtoB à une activité ouverte au grand public, l’Escape Game. Tout au long du projet, le technicien rattaché au Pays de Brocéliande nous a accompagnés et nous le remercions d’ailleurs très sincèrement pour la qualité de son suivi. »
MDE – CED : « Comment envisagez-vous la suite de l’aventure ? »
OT : « Toujours dans cette optique de développement des territoires. L’idée est de continuer à impliquer la population locale, notamment les jeunes. C’était déjà la dynamique portée lors de la phase de conception avec des ateliers autour du numérique organisés au sein du lycée René Cassin de Montfort-sur-Meu. Si un jour les jeunes rencontrés veulent aller dans une école liée aux nouvelles technologies, ils pourront identifier leur territoire comme un lieu d’appui et de développement de compétences. C’est un projet sur le long terme, mais qui nous semble essentiel, tant pour nous en tant qu’entreprise que pour le futur de notre territoire. Mais pour cela, nous avons besoin de plus de moyens et d’une politique territoriale à la mesure de nos ambitions. Les choses changent, lentement, trop parfois, mais elles changent. Il faut continuer dans ce sens et beaucoup de gens comme nous sont motivés pour renforcer l’attractivité de nos campagnes. »
Site officiel du projet : La Marelle – Nouveau lieu culturel et de loisirs en Pays de Brocéliande
La Marelle – Nouveau lieu culturel et de loisirs en Pays de Brocéliande