• Web conférence du 17 juin 2020 // Baudouin BAUDRU

     • Publié le 23 juin 2020 • Rubrique(s) Actualités de la Maison de l'Europe, Conférences - Débats

    Webinaire BaudruBaudouin BAUDRU – Chef de la Représentation de la Commission Européenne à Paris –
    a répondu à cette question au cours d’une web-conférence tenue le 17 Juin 2020 :
    « l’Union Européenne a-t-elle suffisamment de poids face aux stratégies trop souvent divergentes des 27 pays qui la composent ? ».

    La question que nous nous posons aujourd’hui est essentielle car elle interroge la résilience et l’existence même de l’Union Européenne. Elle se pose avec acuité car le premier réflexe des États  membres durant cette crise fut un repli national, ce qui va à l’encontre des principes et du fonctionnement de l’Union Européenne. Malgré cela, il faut souligner les capacités de réaction de l’Union qui lui ont permis de sortir des plus grandes crises au monde. La Communauté économique du Charbon et de l’Acier (CECA), et la Communauté Économique Européenne (CEE) furent créées pour établir un espace de paix. Il s’agira ici de démontrer la capacité de réaction de l’Union Européenne.

    ► La santé n’est pas une compétence exclusive de l’Union Européenne

    Les compétences de l’Union Européenne en matière de santé sont limitées. Dès le début de la construction européenne les États membres n’ont pas voulu mettre en commun un certain nombre de prérogatives qu’ils considéraient comme relevant de leur souveraineté nationale. Le domaine de la santé publique est considéré comme tel.

    Dès lors le domaine de la santé publique fut consacré comme une compétence d’appui (article 6 du TFUE – Traité sur le Fonctionnement de l’UE) où l’Union Européenne complète et coordonne les politiques nationales qui portent sur l’amélioration de la santé publique. Elle « encourage la coopération entre les États membres » et l’échange de bonnes pratiques dans ce domaine, via le programme Santé mis en place par l’Union. 

    ► Un budget pour la santé limité

    L’actuel programme Santé de l’Union (2014-2020) est doté d’un budget de 450 millions d’euros, mis en perspective, cela revient à une contribution de 12 centimes d’euros par citoyen européen (des 28 États membres de l’époque). Ce budget limité, contraint donc fortement les réponses possibles que l’Union Européenne pouvait apportait face au COVID-19.

    Cependant, face à l’ampleur de cette crise sanitaire, elle innove dès le début. Fin janvier, les premières actions sont prises. Le système de protection civile européen est mobilisé pour co-financer les opérations de rapatriement de citoyens européens, et notamment des français bloqués en Chine. Depuis janvier, ce fut plus de 60 000 européens qui furent rapatriés de différentes régions du monde grâce à ce système.

    De plus, un stock de matériel médical est en train d’être constitué. Amélie de Montchalin, Secrétaire d’État chargée des affaires européennes a effectué une demande auprès de la Commission européenne pour héberger ce stock en France, qui à terme sera distribué là où les besoins s’en font le plus ressentir.

    ► Les initiatives de la Commission Européenne pour amortir les effets dévastateurs du COVID-19
    Les lignes directrices pour l’aide aux personnes

    Dans un premier temps il fut nécessaire de rappeler les États membres à un certain esprit de solidarité. Les solutions de repli national et de fermeture des frontières internes décidées par certains États membres pour protéger leur population, leur font in fine courir un plus grand risque : elles bloquent l’acheminement de matériel médical. La Commission a ainsi travaillé à l’élaboration de couloirs verts.

    Il a de plus été demandé aux États membres de contrôler leurs exportations de matériel médical, il s’agissait de conserver ce matériel crucial sur le territoire de l’Union. De plus la Commission a travaillé à la protection de la vie privée, sur fond de vifs débats concernant la création d’applications, notamment « Stop COVID » en France. 

    Des actions concrètes ont été prises pour aider le monde médical, notamment dans l’élaboration d’un vaccin. Ainsi des millions d’euros ont été prêtés aux laboratoires pour qu’ils puissent investir, et embaucher du personnel qualifié. Dans le cas où des vaccins seraient trouvés, des mesures d’anticipation ont été prises, pour réserver et assurer des vaccins à la population européenne.

    Les mesures financières : le soutien du tissu économique

    Les mesures prises par la Commission pour soutenir les États membres, les entreprises et les salariés sont de plusieurs ordres.

    L’Union Européenne a investi 870 milliards d’euros dans la dette souveraine des États membres pour que ces derniers puissent mettre en place des mesures de sauvetage des entreprises. Les fonds structurels européens ont rapidement été réorientés vers les priorités d’investissement : l’achat de matériel de protection, l’investissement dans les systèmes de santé, et vers les régions le plus dans le besoin.

    La Banque européenne d’investissement (BEI), s’est mobilisée à hauteur de 200 millions pour le financement des petites ou moyennes entreprises (PME). Les États membres peuvent accorder des prêts bon marché pour soutenir la trésorerie des PME.

    Le mécanisme européen de stabilité (MES) a été activé, il va accorder des prêts à hauteur de 240 milliards d’euros pour soutenir le développement et achat de traitement médicaux.

    Enfin, les mesures les plus innovantes sont :

    • Un soutien des gouvernements et de s trésorerie pour financer le chômage partiel. Ainsi 11 millions de salariés européens furent aidés financièrement.
    • La possibilité de mettre entre parenthèse pour une certaine période les critères du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) : les États membres peuvent ainsi s’endetter pour relancer leurs économies et de ne plus avoir à se soucier de leur déficit public annuel et de leur dette publique (qui devait respectivement ne pas excéder 3% et 60% du PIB.
    • La facilitation de l’octroi d’aides d’État, dont ont pu notamment bénéficier par exemple Air France et Renault.
    Préparer la relance économique

    La relance économique va être un gros chantier. On déplore pour l’année 2020, une baisse de 7,4% du PIB européen, et de 11% pour la France. Les dettes ont augmenté, celle de la France représente désormais 120% du PIB français. Il faut une réaction à la mesure des enjeux. Pour cela, la Banque Centrale Européenne (BCE) rachète massivement les dettes souveraines et la Commission européenne, mandatée par le  Conseil Européen a mis en place un plan de relance, qui comprend 3 mesures :

    • Le premier pilier est un plan de relance de 750 milliards d’euros (NextGenerationEU) que la Banque Centrale Européenne (BCE) va emprunter sur les marchés financiers. L’objectif est de faciliter la reprise économique via des prêts financiers octroyés aux États membres pour qu’ils puissent soutenir leurs économies.
    • Sur l’investissement privé dans des projets sur le territoire de l’Union.
    • Le troisième pilier : s’articule autour du nouveau programme ReactEU, il s’agira de répartir une enveloppe de 55 milliards vers les priorités sociales. Les États membres pourront allouer des aides aux organismes qui soutiennent les personnes qui ont le plus durement subi la pandémie : Restos du cœur, Croix rouge, Banque Alimentaire,…
    • Pour finir, une nouvelle proposition a été faite concernant le cadre financier pluriannuel (2021 – 2027), qui prend en compte les enseignements de cette crise. Ainsi le nouveau programme Santé sera doté d’un budget de 9,4 milliards d’euros, contre 0,450 pour le précédent. Il s’agira de  développer des infrastructures, renforcer la sécurité sanitaire pour se préparer à des crises sanitaires futures. 
    Les leçons à tirer de la crise

    La première leçon à tirer serait que l’Union Européenne n’était pas équipée pour répondre à cette crise. Les mesures précitées devraient permettre d’être mieux préparé à l’avenir. Il va également falloir relocaliser certaines activités en Europe, diversifier les sources d’approvisionnement afin d’éviter d’être dépendant d’un seul fournisseur pour le matériel médical.

    La seconde leçon à tirer, est que la solidarité européenne n’était pas assez intégrée. Pendant la crise les réunions ministérielles se sont déroulées deux fois par semaine pour pouvoir coordonner la réponse des États membres. Cette structure est à maintenir, car cette crise a rendu clair qu’aucun État membre, ne peut espérer affronter et se relever seul d’une telle crise. Seule une réponse coordonnée pourra être à la hauteur des enjeux.

    Quelques chantiers auxquels nous intéresser dans les mois et années à venir

    Aux questions qui lui ont été posées, Baudouin Baudru a montré combien il était important d’avancer et pour cela il a cité plusieurs chantiers sur lesquels il était possible de s’investir, et en particulier

    • En participant au dialogue citoyen qui va s’ouvrir dès le mois de Juillet prochain et dont un aura lieu en Bretagne
    • En s’engageant dans les Conférences sur l’avenir de l’Europe qui se dérouleront pendant deux années et en deux étapes : une première étape dans les États membres de l’Union européenne et la deuxième au niveau européen
    • En renforçant l’enseignement sur la citoyenneté européenne dans tous les cycles de l’enseignement
    • En demandant aux médias d’informer davantage sur ce que fait l’Union européenne pour protéger et soutenir ses citoyens dans l’environnement mondial dans lequel nous sommes
    • Et en inscrivant dans la formation au cours du Service National Universel, un module Europe.

    Ces chantiers sont ouverts aux citoyens,. Et chacun pourra mieux comprendre au sortir de cette crise que nous vivons, combien l’Union européenne a agi pour aider les Etats membres leurs économies et surtout leurs citoyens par mille et une solutions qui s ‘inventent tous les jours ; L’Europe c’est aussi cela : un chantier toujours ouvert.

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